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La paix commence par des gestes : rencontre avec Sœur Sheila Kinsey

Posted 18 September 2025

Pour Sœur Sheila Kinsey, la paix n’est pas une idée abstraite. Elle a de la terre sous les ongles, des racines dans le sol et le cœur battant de ceux qui la cultivent.

“Quand je me sens dépassée par la souffrance des peuples en guerre, par la destruction des terres et le gaspillage des ressources, je trouve réconfort dans les paroles du pape François: ‘Tout est lié, et nous sommes unis comme frères et sœurs dans un merveilleux pèlerinage…’

Sœur Sheila Kinsey remet au pape François une lettre écrite par les participants d’un atelier en République du Congo.

Souriez d’abord. Commencez petit.

Au fil des années, Sœur Sheila a porté de nombreuses responsabilités : enseignante, directrice d’un centre d’accueil pour femmes et enfants, coordinatrice du projet Semeurs d’Espérance pour la Planète, co-secrétaire exécutive de la Commission de Justice, Paix et Intégrité de la Création à Rome, et aujourd’hui représentante de L´Initiative Catholique pour la Non-violence (CNI).

Un fil rouge traverse toutes ces missions : la paix. Pas la paix comme simple absence de conflit, mais comme un art de vivre en juste relation les uns avec les autres et avec la Terre.

Parfois ça commence simplement par un sourire offert à un inconnu, une parole bienveillante qui redonne courage. Pour Sœur Sheila, ces gestes font déjà partie de la Paix avec la Création.

Cette vision—Paix avec la Création—est le thème du Temps pour la Création 2025. Mais Sœur Sheila l´incarne depuis des décennies : des communautés congolaises affrontant l’exploitation de leur terres, aux jeunes kényans qui cultivent et partagent leur récoltes en solidarité, jusqu’aux théologiens et agents pastoraux ougandais qui animent des cercles de vérité et de compassion pour guérir de blessures.

Travaillez ensemble. Au-delà des frontières.

Pour Sœur Sheila, la Paix avec la Création n’est pas une théorie. Elle l’a vu germer dans des lieux marqués par la pauvreté et la violence.

“Chaque pays a montré sa résilience face aux défis écrasants de la pauvreté, en puisant dans les valeurs de la non-violence” se souvient-elle. “En République démocratiqur du Congo, l’exploitation minière a été affrontée par des formations pratiques pour recueillir des preuves des dégâts environnementaux.”

“En Ouganda,” dit-elle, “théologiens, psychologues et acteurs de terrain participent à un processus appelé Vérité et Compassion : Un Chemin Spirituel Face aux Blessures et à la Guérison. Le Bethany Land Institute revitalise les sols grace a la reforestation et a la formation agricole. Au Soudan du Sud, les communautés prennent conscience des relations sociales qui nourrissent les conflits et développent des projets pour mieux protéger l’environnement.”

La vie reprend au Bethany Land Institute en Ouganda.

Pour Sœur Sheila, ces initiatives montrent que la Paix avec la Création est déjà à l’œuvre. Les communautés n’attendent pas les conditions idéales : elles avancent avec ce qu’elles ont, en transformant la non-violence en actes concrets de soin, de guérison et de solidarité.

Dire “Paix et Tout Bien”. Et le vivre vraiment.

Sœur Sheila est franciscaine, et cela colore toute sa vision. Elle se souvient de saint François qui saluait les gens en disant “paix et tout bien”. Ce n´était pas des mots en l´air :

“Assise, du temps de saint François, était souvent en guerre avec la ville voisine de Pérouse. Il savait que la paix était bien plus que l’absence de guerre. Quand il disait “paix et tout bien” au peuple, c’était une invitation sérieuse : cultiver la paix intérieure pour qu’elle devienne une attitude capable de transformer les relations et de prendre soin de toute la création”.

Statue de saint François tenant une colombe à la cathédrale catholique de l’Assomption de la Vierge Marie à Chania, en Grèce.

Cette paix intérieure, ajoute-t-elle, est inséparable de l’écologie : “La paix intérieure est intimement liée au soin de l’écologie et au bien commun vécu dans l’authenticité.”

Alors que l’Église se prépare à célébrer la Fête de Saint François le 4 octobre, les paroles de Sœur Sheila rappellent que son héritage est vivant non seulement dans les prières et les cantiques, mais dans chaque geste de soin envers la Terre.

Des outils pour la solidarité.

Ce que les communautés accomplissent de leurs propres mains doit être soutenu par des réseaux qui permettent de partager, d’apprendre et d’agir ensemble.

C’est là qu’intervient la Plateforme d’Action Laudato Si’. “Notre présence sur Internet est un outil incroyable pour diffuser les septs objectifs : le cri de la Terre, le cri des démunis, l’économie écologique et la résilience communautaire. L’interconnexion de ces démarches est inspirante et engage chacun de manière concrète,” explique-t-elle.

“Le fait d’avoir ces informations si facilement accessibles permet aux participants de travailler ensemble malgré la distance, de se réunir autour de thèmes précis et de déterminer des axes de plaidoyer.”

Bénissez. Marchez. Rendez grace.

Sœur Sheila ne conclut pas par la théorie. Elle termine par une bénédiction : prononcée non pas derrière un bureau à Rome, mais au long d’un pèlerinage vécu aux côtés des démunis, des femmes au foyer d’accueil et de la création elle-même.

Bénédiction sur le Chemin de la Paix avec la Création

Que Dieu vous bénisse sur votre chemin de paix avec la création. Nous rendons grâce pour toutes les graines semées ; elles sont bien tombées en terre. Beaucoup fleurissent. En grandissant, elles portent les fruits de l’amour et de la compassion.

Prions en solidarité pour réaliser “le dessein d’amour de Dieu ou chaque créature a sa valeur et sa signification.” (Laudato Si’ 76)

Bénis soient ceux qui prennent un temps de contemplation pour reconnaître la présence de Dieu dans les autres, dans la nature et dans toute la création.

Bénis soient ceux qui soignent la terre en plantant et en revitalisant nos forêts.

Bénis soient ceux qui cultivent en utilisant des engrais et pesticides naturels qui protègent les plantes ainsi que la santé et les moyens de subsistance des habitants.

Bénis soient ceux qui défendent leurs droits personnels et sociaux face aux compagnies minières et autres pratiques d’exploitation.

Bénis soient ceux qui reconnaissent l’importance de préserver la précieuse biodiversité de notre monde.

Bénis soient ceux qui partagent les fruits de la terre avec ceux qui en ont besoin.

Bénis soient ceux qui comprennent l’importance de la solidarité, en coordonnant ensemble le soin envers notre maison commune.

Amen.